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Un climat de peur s'est imposé au Burkina Faso

11 mars 2024

Malgré la libération de certaines figures de la vie publique du pays, les enlèvements et réquisitions forcées se poursuivent dans le pays.

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Des militaires burkinabè dans une rue de Ouagadougou
Depuis la chute en janvier 2022 du président Marc Christian Kaboré, les militaires sont au pouvoir au Burkina Faso Image : Kilaye Bationo/AP Photo/picture alliance

L'ancien ministre des Affaires étrangères, Ablassé Ouédraogo, a été libéré jeudi dernier et a regagné son domicile de Ouagadougou. Il avait été réquisitionné de force, fin décembre, et était depuis retenu dans le camp militaire de Kaya pour prêter main forte à l’armée, dans le cadre de la lutte contre le djihadisme. Le 8 mars, c’était le tour de Daouda Diallo, secrétaire général du Collectif contre l’impunité et la stigmatisation des communautés, de recouvrer la liberté. 

Daouda Diallo est le secrétaire général du Collectif contre l’impunité et la stigmatisation des communautés
Enlevé le 1er décembre 2023, Daouda Diallo a été libéré vendredi 8 marsImage : Sophie Garcia/AP/picture alliance

Fin février, deux militants du mouvement Balai citoyen ont été à leur tour enlevés par des hommes armés et conduits vers une destination inconnue. 

Il s’agit de Rasmané Zinaba et Bassirou Badjo. Un mois plus tôt, le célèbre avocat Guy-Hervé Kam avait été enlevé par des inconnus en civil à l’aéroport de Ouagadougou. 

Le 7 mars dernier, la justice burkinabè a ordonné la remise en liberté immédiate de l’avocat, car sa détention porte atteinte à sa liberté fondamentale. Selon l’agent judiciaire de l’Etat, Guy-Hervé Kam est poursuivi dans une affaire « d’atteinte à la sûreté de l’Etat », pour avoir essayé de mobiliser les étudiants et les chefs coutumiers. 

Adrien Poussou, ancien ministre centrafricain de la Communication et de la Réconciliation nationale, et analyste politique, critique la répression conduite par le pouvoir militaire du capitaine Ibrahim Traoré.

"Ce qui se passe au Burkina fait froid dans le dos" (Adrien Poussou)

Selon lui, "Ibrahim Traoré, étant conscient de son incapacité à apporter des solutions aux problèmes quotidiens de ses compatriotes, fait de la diversion et il veut instaurer un climat de peur, un climat de terreur, de sorte que les Burkinabè puissent s'autocensurer et ne puissent pas critiquer sa politique qui a montré ses limites".

Appréhension et incertitudes

Face à cette chape de plomb imposée par les militaires, les Burkinabè sont dans l’embarras, estime Ousmane Diallo, chercheur principal sur le Sahel, bureau régional d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre.

Le chercheur explique que "les Burkinabè, dans leur majorité, sont partagés entre l'appréhension par rapport aux événements qui se passent et l'incertitude par rapport à la situation sécuritaire. Et c'est sur ces deux tableaux que joue le gouvernement. Il y a une effervescence populaire, notamment à Ouagadougou, pour lutter contre l'insécurité à travers la mobilisation des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), à travers des contributions patriotiques et aussi l'Alliance des Etats du Sahel (l’AES, encore appelée alliance du Liptako-Gourma, est un pacte de défense mutuelle conclu entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso, ndlr).

"Amnesty international a alerté les autorités burkinabé" (Ousmane Diallo)

C’est dans ce contexte qu’ont eu lieu, le week-end dernier, deux attaques par des hommes armés dans la région du centre-est du pays. Une autre attaque a eu lieu la veille dans cette région frontalière du Togo et du Ghana. 

Ibrahim Traoré, le président de la transition au Burkina Faso, a officiellement signé, jeudi 20 avril 2023, le décret de mobilisation générale.   Un texte qui, pendant douze mois, permet aux autorités de prendre des mesures exceptionnelles, au nom de la sécurité nationale. Tout jeune de 18 ans ou plus, apte physiquement, peut être appelé à s’enrôler pour participer à l’effort de guerre, notamment à la lutte contre le djihadisme.